Le dirigeant d’une société se porte généralement caution de sa société en sa qualité de dirigeant.
En effet, en pratique, les prêts sont accordés aux entreprises en contrepartie du cautionnement de leurs dirigeants.
La caution dirigeante n’a souvent pas le choix de s’engager solidairement.
Voyons, dans un premier temps, la définition du cautionnement et de la caution personne physique. Puis nous verrons les règles qui s’appliquent en cas de procédure collective ainsi que quelques moyens de défense du dirigeant caution solidaire.
Définition du cautionnement
Selon l’article 2288 du Code civil : « Le cautionnement est le contrat par lequel une caution s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci. Il peut être souscrit à la demande du débiteur principal ou sans demande de sa part et même à son insu ».
Le cautionnement est un contrat conclu entre le créancier et la caution. C’est un contrat unilatéral car seule la caution est engagée. Le créancier est bénéficiaire de la garantie.
La caution doit indiquer le montant de son engagement en chiffres et en lettres.
Le cautionnement peut être simple ou solidaire.
Lorsque le cautionnement est simple, le créancier bénéficie du bénéfice de discussion (cela permet au créancier d’agir contre la caution si, et seulement si, le débiteur principal est insolvable) et du bénéfice de division (ce principe joue en cas de pluralité de cautions : dans ce cas, chaque caution ne prendra en charge que la part pour laquelle elle s’est engagée).
Lorsque le cautionnement est solidaire, le créancier peut directement solliciter la caution. La caution est alors obligée de payer les dettes du débiteur principal et ce, dès le premier impayé. La caution ne peut opposer au créancier ni le bénéfice de discussion ni le bénéfice de division.
Selon l’article 2297 du Code civil, il existe une mention manuscrite spéciale pour les cautionnements solidaires (alinéa 2 de l’article). Si cette mention n’apparait pas dans l’acte de cautionnement, le cautionnement redevient simple.
Il est précisé que la solidarité est présumée dès lors que le cautionnement est commercial.
A défaut de stipulation expresse, le cautionnement est simple.
Définition de la caution personne physique
La caution personne physique doit, à peine de nullité de son engagement, rédiger une mention manuscrite (article 2297 du Code civil).
Elle doit être mise en garde par le créancier professionnel quand l’engagement souscrit par le débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier (article 2299 du Code civil).
Elle doit être informée de l’évolution de la dette et de la défaillance du débiteur principal (article 2302 du Code civil).
Il existe aussi un devoir d’information sur la défaillance du débiteur (article 2303 du Code civil).
La caution personne physique peut être un profane, mais également un dirigeant d’une société qui s’engage à garantir les dettes de la société qu’il dirige.
La caution personne physique et les procédures collectives
Le droit des entreprises en difficulté a prévu des mécanismes protecteurs pour la caution dirigeante personne physique.
Elle bénéficie du principe de suspension des poursuites pendant une procédure de sauvegarde et de redressement judiciaire, mais également pendant la durée du plan de sauvegarde ou de redressement.
En effet, ce régime instauré initialement dans la sauvegarde a été étendu à la procédure de redressement judiciaire par l’ordonnance du 15 septembre 2021.
Désormais, autant en sauvegarde qu’en redressement judiciaire, les coobligés et les garants personnes physiques peuvent se prévaloir des dispositions du plan, mais également de l’inopposabilité des créances non déclarées et de l’arrêt du cours des intérêts.
Cette mesure de protection ne bénéficie qu’aux personnes physiques. Les garanties consenties par des personnes morales conservent, quant à elles, leur efficacité pour les créanciers concernés.
Néanmoins, les créanciers qui bénéficient de cautions consenties par des personnes physiques peuvent prendre des mesures conservatoires à leur encontre pendant cette période de répit. En effet, il existe un risque de voir se fragiliser la solvabilité de la caution. Le créancier peut, par exemple, prendre une inscription provisoire d’hypothèque.
Mais en pratique, c’est compliqué pour le créancier car l’article R. 511-7 alinéa 1 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit : « Si ce n’est dans le cas où la mesure conservatoire a été pratiquée avec un titre exécutoire, le créancier, dans le mois qui suit l’exécution de la mesure, à peine de caducité, introduit une procédure ou accomplit les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire ». Par conséquent, cela signifie que le créancier dépourvu de titre exécutoire qui prend une mesure conservatoire doit, à peine de caducité de cette mesure, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire dans le mois suivant l’exécution de cette mesure. Or, la loi suspend les poursuites contre la caution au moins jusqu’à la fin de la période d’observation.
Mais selon la jurisprudence, l’arrêt des poursuites entraine la suspension immédiate de l’instance pendant la période d’observation mais l’instance pourra être reprise par le créancier après le jugement arrêtant le plan de sauvegarde ou de redressement ou prononçant la liquidation judiciaire.
Par ailleurs, la jurisprudence permet au créancier d’agir contre le garant au fur et à mesure des échéances de plan de sauvegarde qui ne seraient pas respectées.
En revanche, il est rappelé que les cautions personnes morales ne bénéficient pas de cette protection. En principe, le créancier peut exercer des poursuites contre elles dès que la créance est exigible.
En cas de liquidation judiciaire, les cautions, personnes physiques et morales, ne bénéficient pas de mesures de protection. Elles peuvent donc être poursuivies par les créanciers dans les conditions de droit commun (tel est le cas par exemple si la créance est exigible), même par des créanciers forclos.
Il est précisé que pour les procédures collectives ouvertes avant le 1er octobre 2021, la caution peut se prévaloir des conditions de l’admission de la créance.
Pour les procédures collectives postérieures au 1er octobre 2021, pour actionner la caution, le créancier doit lui dénoncer l’état des créances, ce qui lui ouvre un recours contre l’état des créances dans le délai d’un mois de la signification.
Enfin, il est précisé que la déclaration de créance au passif du débiteur principal en procédure collective interrompt la prescription à l’égard de la caution et cet effet se prolonge jusqu’à la clôture de la procédure collective.
La disproportion du cautionnement : un moyen de défense redoutable ?
La disproportion du cautionnement a fait l’objet d’une refonte avec l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021.
Pour les cautionnements conclus avant le 1er janvier 2022 – Les dispositions du Code de la consommation sanctionnaient le créancier professionnel qui avait obtenu d’une personne physique qu’elle se porte caution envers lui alors que le montant de l’engagement, au jour de l’acte de cautionnement, était manifestement disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution (anciennement les articles L. 314-18 et L. 332-1 du Code de la consommation).
Si tel était bien le cas, le créancier ne pouvait pas se prévaloir du cautionnement. La déchéance du cautionnement était prononcée.
La disproportion était appréciée souverainement par les juges du fond. Ils devaient prendre en compte les revenus et le patrimoine de la caution au jour où elle s’était engagée. Etaient pris en compte les cautionnements antérieurs souscrits par la caution. Mais également les biens indivis et les biens communs mais seulement pour la part appartenant à la caution.
Si, au jour où le créancier appelait la caution, cette dernière avait à nouveau un patrimoine lui permettant de payer sa dette, elle devait s’exécuter. Là encore, le juge appréciait sa capacité à payer selon les mêmes modalités qu’au jour de l’acte de cautionnement.
Ainsi, les juges devaient apprécier le caractère manifestement disproportionné, d’une part, au moment de la conclusion de l’engagement de la caution et, d’autre part, au moment où la caution était appelée. Dans le passif, les juges devaient prendre en compte les autres dettes mais aussi les autres éventuels cautionnements que la caution avait souscrits après celui pour lequel elle était appelée.
Selon la Cour de cassation, c’est à la caution qu’il incombait de prouver que le cautionnement était manifestement disproportionné à ses biens et revenus. L’établissement de crédit devant, quant à lui, démontrer la preuve contraire ou démontrer que la caution s’était enrichie et était désormais en mesure d’honorer son engagement au jour où elle était appelée.
Avant l’ordonnance du 15 septembre 2021, la sanction de la disproportion était la décharge totale.
Pour les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022 – Les articles L. 314-18, L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation ont été abrogés. Un nouvel article 2300 du Code civil a été créé pour traiter de ce sujet : « Si le cautionnement souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux revenus et au patrimoine de la caution, il est réduit au montant à hauteur duquel elle pouvait s’engager à cette date ».
Désormais, pour les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022, la caution qui souhaite invoquer la disproportion doit utiliser ce nouvel article 2300 du Code civil.
Pour que cet article puisse s’appliquer, il faut que la caution soit une personne physique et que le créancier soit un créancier professionnel. Ces critères sont classiques. Ils ont été repris du droit de la consommation.
Donc ce nouvel article 2300 du Code civil ne s’applique pas aux cautions personnes morales.
La disproportion doit toujours être manifeste. Ce critère n’a pas changé non plus.
Toutefois, le moment d’appréciation de la disproportion a changé : pour les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022, il s’agit uniquement du jour de la conclusion de l’acte de cautionnement. Les créanciers ne pourront donc plus invoquer l’amélioration de la santé financière de la caution au jour où elle est appelée par le créancier.
Le changement majeur de la réforme consiste en la réduction du cautionnement. Alors qu’avant, la sanction de la disproportion manifeste était la décharge totale, il s’agit désormais d’une réduction de l’engagement de caution pour les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022.
Sur ce point, le créancier voit sa position nettement améliorée. La caution demeurera engagée même en cas de disproportion manifeste. Son engagement de caution sera réduit à hauteur duquel elle pouvait s’engager à la date du cautionnement.
Exemples d’autres moyens de défense du dirigeant caution solidaire
La caution peut opposer les exceptions personnelles ou inhérentes à la dette (article 2298 du Code civil). A noter que pour les cautionnements avant le 1er janvier 2022, la caution ne peut invoquer que les exceptions inhérentes à la dette (exemples : prescription, nullité, paiement, résolution, caducité etc.). Pour les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022, la caution peut également invoquer les exceptions personnelles au débiteur (exemples : délais de grâce, suspension des poursuites en cas de procédure collective, etc.).
Par ailleurs, en principe, la caution ne peut être actionnée que si la dette du débiteur principal est exigible.
Il est précisé que le créancier bancaire dispose d’un délai de 5 ans pour actionner la caution dirigeante à compter du premier incident de paiement non régularisé par le débiteur principal. Passé ce délai, l’action du créancier est prescrite et donc irrecevable (article L. 110-4 du Code de commerce).
Il est également possible d’invoquer la nullité du cautionnement pour non-respect du formalisme. Pour les actes de cautionnement souscrits après le 1er janvier 2022, c’est l’article 2297 du Code civil qui s’applique en la matière (pour les cautionnements antérieurs au 1er janvier 2022, ce sont les dispositions du Code de la consommation susvisées qui s’appliquent).
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Bonjour, j’ai une caution solidaire que la banque bloque et que les nouveaux associés ne veulent pas reprendre. Quels sont les risques, pouvez vous me renseigner ?
Bonjour, je vous invite à prendre RDV pour en discuter